L’une des principales tares du travail (concurrentiel et carriériste), est de nous contraindre à vivre à côté de nos pompes, ou disons plutôt devant nos pompes ...funèbres. L’étiquette sociale de "travailleur" crée une dichotomie préalablement inexistante. Tout ce qui est en-dehors de cette sphère professionnelle, de cette attitude professionnelle, est relégué au riens à l’inerte. Dans un tel système de valeurs, le chômeur comme le bénévole ou même le free rider n’a d’autre lieu d’appartenance que le chômage, les vacances ou les loisirs. Ces préjugés solides -il ne s’agit pas d’indiquer de coupable mais de témoigner d’un climat général d’auto-surveillance administrée tue-désir- entament la dignité du non-travailleur, car il n’est pas inactif. L’opposition travail-paresse n’a donc de sens qu’en acceptant pour universelle une série de facteurs idéologiques. Ces facteurs sont déterminants car ils enferment l’individu dans une institution particulière prônant des attitudes professionnelles particulières et favorisant l’hermétisme des classes socio-professionnelles.
Il s’agit d’une tenue de soi aliénante, dont les "écarts" ou "mises à l’écart" s’accompagnent de culpabilité (car le travailleur pense manquer à sa tâche), mais surtout d’une conception du temps linéaire et cumulative (entraînant l’isolement affectif, le repli sur la sphère familiale et l’insatisfaction).
2ème étape : un renversement du travail comme élément inséré dans des planifications globales échappant aux travailleurs.
Le travailleur prenant enfin pleinement conscience de son statut d’exploité a perdu ce qui lui rendait le travail tolérable... la notion d’UTILITE. Le drame du militantisme de gauche était en germe dans la notion de révolution. La révolution se devait d’exterminer un à un les déterministes externes contribuant à l’aliénation du prolétaire. Ce faisant, en accédant aux acquis sociaux, le prolétaire abolissait du même coup ses anciennes structures mentales. Qu’il s’agisse du prolétaire ascendant (60’s) ou descendant (80’s), l’ouvrier se trouvait à un moment ou à un autre confronté à des phénomènes d’acculturation sans précédent.
Le travail ne donne plus le sentiment d’être utile, car il ne correspond pas à une amélioration du monde, et certainement pas à un approfondissement de notre lien à l’existence. Le travail est devenu débilitant.
Le réactionnaire au monde du travail est, dans certains cas, un individu "glissant’’ et autarcique qui ne croit plus à aucun projet collectif. Son attitude de lutte est la fuite, la fuite comme mouvement, mouvement hors du cadre de la représentativité et de la récupération.
Le pire est que l’obstacle majeur à une redéfinition du travail émane bien souvent elle aussi du prolétariat. Les ostracismes régionaux (SeraingFlémalle-Charleroi), le repli de certaines zones ouvrières sur leur propre désarroi, n’amènent que des constats mélancoliques et rétrogrades. Les propos les plus drastiques concernant le travail viennent de ces prolétaires gui rêvent encore de son influence sur un monde qui les dépasse et sur lequel ils n’ont plus prise. D’un prolétariat à l’autre, il existe peut-être plusieurs solutions.
Ceux qui croient encore à la valeur travail : il ne suffit pas de licencier ou même de réinfecter des sommes astronomiques au sein d’industries condamnées à mourir, mais de permettre à l’ouvrier une réinsertion dans des cadres de travail différents (culturels-intellectuels-artistiques-technologiques etc ...)
Ceux qui ne croient plus à la valeur travail : NOUS NE VOULONS PLUS DE VOTRE TRAVAIL ! ET SACHEZ QUE VOTRE TRAVAIL NE DEFINIT PAS L’EXISTENCE !!!!
Un retournement révolutionnaire serait d’admettre que les efforts à venir iront dans le sens non d’une résolution de la crise, mais plutôt d’une extirpation de plus en plus globale de l’être hors de la sphère de l’avoir. Un glissement progressif de la notion de production à la notion de création et d’invention. Mais cela sous-entend que dans certains secteurs, de plus en plus larges et nombreux, espérons-le, la parole reprenne le pas sur la communication.