A la Maison des Jeunes du Nord " LA BIBI ", 26 rue Lamarck à 4000 Liège, de 10 à 18h.
Le cadre
Ces deux journées (entre kamarades, " en petit comité ") suivront une table ronde qui se déroulera le vendredi 11 et qui portera plus particulièrement sur le(s) devenir(s) de nos pratiques politiques " alternatives " au niveau international. Seront présents à cette table ronde publique : des amis de Longo Maï (coopérative agricole et culturelle "expérimentale" qui s’est établie depuis plus de 25ans dans le sud de la France), John Jordan (ex-Reclaim the Street, Royaume Uni), Matteo Jade (porte-parole gênois des "Disobbedienti", mouvement des désobéissants, ex-Tute Bianche italiens), et un représentant hollandais de l’"Action Mondiale des Peuples".
Les rencontres des 12 et 13 porteront d’avantage sur le(s) devenir(s) de nos pratiques politiques au niveau local -même si nos amis étrangers pourront nous apporter leurs éclairages sur telle ou telle question. En gros, c’est ça l’objectif de cette rencontre, se poser ensemble des questions, et si c’est possible, y apporter des (débuts de) réponses.
Ces questions sont "qu’est-ce qu’on peut faire ?", ensemble et/ou localement, et aussi "comment fait-on ?", et surtout "dans quel(s) but(s), à courte ou longue échéance...."
Bref on ne manquera pas de sujets de conversations...
En guise d’introduction
Se passer des recettes, les transgresser...
Dans notre imaginaire politique le 1er janvier 1994 reste un moment fort. L’EZLN sortait de la forêt. Et l’insurrection Zapatiste allait, selon nous, devenir un des principaux moteurs de la reconstruction des luttes anti-capitalistes qui se redéploieraient ensuite de multiples façons partout dans le monde.
Incontestablement, cette dernière décennie aura été celle de l’émergence de pratiques politiques d’un antagonisme radical à ce qu’on est aujourd’hui de plus en plus nombreux à appeler l’Empire.
La logique Zapatiste est neuve en ceci qu’elle ne repose plus sur la conquête du Pouvoir - à quelque niveau que ce soit. Elle consiste simplement à libérer des territoires par et pour ceux qui y vivent. Pour qu’y circulent une multitude de possibilités de vie, d’invention, de création. L’insurrection Zapatiste ne vise pas à la prise de structures institutionnelles ou publiques. Elle a pour but de se protéger de volontés hégémoniques extérieures et de dispositifs d’assujettissements qui menacent le droit d’usage des indigènes sur des terres et sur les équipements dont ils sont les co-constructeurs. Leur lutte relève donc d’ une conception de la démocratie bien plus attachée à la reconnaissance des minorités - revendiquant des droits pour celles-ci - qu’à l’imposition d’un modèle par et pour la majorité.
Une multitude de mouvements se sont, selon nous, engouffrés dans cette nouvelle perspective politique, non pas comme simples reproducteurs, mais en la re-créant pour l’adapter à des situations singulières. Partout de Seattle à Gênes - et jusqu’à Porto Allegre ( ?) - on a désobéi aux mécanismes d’asservissement impériaux pour réaffirmer des principes fondamentaux. Ceux du droit pour chaque être humain de disposer d’un logement, de circuler librement, de faire usage d’équipements publics (tels que les transports en commun), de manger et voire même de manger correctement. Partout on a désobéi aux dispositifs de pouvoir impériaux pour inventer des droits, des façons de travailler et des formes de vie minoritaires et/ou invisibles.
L’extension et la mutation des droits s’est imposée comme la véritable politique des multitudes.
Cette émergence de nouveaux mouvements a aussi (modestement) contribué à bouleverser les pratiques politiques liégeoises. Plusieurs expériences s’inscrivant dans cette perspective politique ont été menées - avec plus ou moins de succès. Les dernières initiatives ont révélé des difficultés de fonctionnement et d’organisation. Elles impliquaient différents groupes d’affinités et des singularités différentes.
Si certaines de ces expériences furent vécues comme des réussites (la street
party du 1er mai), il nous est très vite apparu que nous maîtrisions très mal les mécanismes qui font de telle action un succès et de telle autre un
demi-échec. que nous avions un déficit de méthodes quant à la construction d’une force antagonique puissante - et donc rassemblant des subjectivités multiples.
Les questions que nous nous posons nous en ce moment, les difficultés auxquelles nous sommes confrontés, nous sommes convaincus que d’autres ailleurs y sont -ou y ont été- confrontés : " Comment pour un collectif monter en puissance ? ", "Comment libérer des espaces autonomes ? ", " Comment assurer l’autonomie, voire l’auto-subsistance -déjà juste financière, mais aussi alimentaire...- de ces espaces ? ", " Jusqu’où on collabore ou non avec des mouvements plus institutionnels ? ", " Comment on fait au mieux circuler l’info, comment on se forme et comment on transmet nos savoirs ? ", " Comment on intègre de nouvelles composantes dans nos territoires, c-à -d. comment on s’ouvre suffisament sans se diluer (question de la démocratie directe ou pas, question de l’hospitalité et
de la convivialité, modalités d’intégration au groupe...) ? ", " Comment on
partage les tâches sans tomber dans la spécialisation (intellos-manuels...)
?", " Et formellement, quelle esthétique pour nos luttes, et comment on la
travaille (questions autour du discours, du langage, de l’accessibilité) ? ", "
Comment est-ce qu’on s’ancre suffisament dans un espace, une réalité, sans
tomber dans le piège identitaire et sans renoncer au nomadisme qui fait aussi notre richesse ? ", " Quand on n’attend plus le Grand Soir, comment tirer de nos luttes des bénéfices pour nos vies quotidiennes, c-à -d. comment ne pas avoir l’impression qu’on se sacrifie en vain ? ", " Et, surtout, comment est-ce qu’on ne s’essoufle pas ? " et " Qu’est-ce qu’on fait, une fois qu’on a fini de se poser toutes ces questions ? "...
Bref, nous nous retrouvons un peu dans la même position que d’autres dissidents avant nous, nous demandant Que faire ? - avec la ferme intention de reprendre la question sans garder la méthode. Aujourd’hui, il nous semble nécessaire de s’arrêter un instant, pas tant pour faire le point que pour redessiner de nouvelles lignes de fuite - véritables vecteurs de nos luttes à venir. C’est dans cette perspective que nous invitons des militants d’horizons divers et dont les pratiques ont su dépasser ces difficultés, gagnant en puissance et s’inscrivant dans la durée. Conscients que les méthodes de luttes ne sont pas transposables d’une situation à une autre, nous sommes néanmoins désireux d’acquérir des savoirs que nous pourrions ensuite ré-actualiser chacun dans nos territoires et selon nos spécificités.
Créer des réseaux ...
Si nous pensons que nos luttes doivent d’abord viser à tisser des réseaux locaux forts, nous sommes également convaincus qu’aucune tentative de contre-pouvoir efficiente ne peut se construire, aujourd’hui, sans prendre en compte la dimension globale des dispositifs de pouvoir impériaux et donc sans se penser, elle aussi, globalement. Dès lors, se dessine une autre problématique essentielle : comment articuler des coopérations entre différentes expériences et différents mouvement au niveau mondial - et plus modestement dans le cadre de ce séminaire au niveau local et européen ?