JOURNAL D’INFORMATIONS INTERGALACTIK n 458,
section B12, mardi 03 mai 35.
concerne : électron parasitaire proche de notre atmosphère.
L’électron parasitaire évolue disséminé entre résidus & rejets polluants terriens - et circule d’un pôle à l’autre du système solaire - déjouant l’attraction des astres. Il peut s’apparenter à un minerai organique grouillant d’enzymes-mutants - dispersant ci & là de la poussière d’électron - émancipant le corps et l’esprit.
Le minerai parfois pénètre l’atmosphère pour se répandre dans les entrailles de la terre.
Si vous êtes muni d’un micro-ordinateur, d’un modem, d’une ligne téléphonique & d’une interface MIDI : c’est votre conscience qu’il pénètre - & c’est l’Empire qui recule.
Pour plus de renseignements : http:interc.bbb (en appuyant sur shift et #cage#) de nouvelles instructions en ligne alors suivront - soyez discret - n’importunez pas le distributeur.
Je me retrouvais avec ce tract entre les mains sans avoir aperçu le distributeur. Mais bon, j’ai des circonstances atténuantes ; c’est mon premier jour et d’habitude, à cette heure matinale, je suis dans un profond coma. Ouaip’ fini l’autogestion de mon temps de travail, ... imaginez, je quitte mon appartement pour affronter la pollution des voitures roulant pare-choc contre pare-choc, avant de m’engouffrer dans un métro bondé puant la cocotte et l’eau de Cologne, et tout ça pour aller où ? ... Devant un ordinateur... J’vous jure que c’est pas la blague.
Les experts du siècle dernier n’ont pas eu tout à fait tord quand ils estimaient qu’au total des salariés de l’Empire, 80% seraient télétravailleurs en 2030. Là où ils se sont plantés (ou ont voulu planter l’opinion publique) c’est qu’en réalité, seule une petite minorité de privilégiés (moins de 10%) travaillaient chez eux, les autres télétravaillaient... Au bureau.
Ca n’a pas toujours été comme ça.
12 : Les premiers mouchards électroniques en service sur les ordinateurs des télétravailleurs à domicile provoquèrent un tollé médiatique et un levé de boucliers des deux principaux syndicats de l’Union. On pouvait dire que la commission d’Étude, chargée d’enrayer la déréglementation absolue provoquée par cette "réorganisation du monde du travail", loupait complètement son coup d’envois.
Expression quelque peu vieillie, ’mouchard’ désigne un appareil de contrôle et de surveillance, utilisé à une époque pour réglementer les courses des transporteurs routiers. Suivant une analogie simpliste que seul un gouvernement obsolète pouvait concevoir, ce fut le même principe pour ces millions d’autoroutiers de l’informations lâchés dans la nature par leur entreprise ou administration.
Les gars du commerce extérieur, ils savaient y faire avec les mouchards. Ils bossaient comme des bêtes 8 heures par jours réglementaires, mais avec 3 bécanes multiprocesseurs connectées sur une seule ligne téléphonique. Un mouchard, c’est bien connu, ça se trafique... La satisfaction condescendante du patronat était comble devant les efforts surhumains de leurs cadres. Il y voyait l’aboutissement de l’idéologie d’entreprise, ainsi qu’une vague espérance d’apercevoir la relance du marché intérieur qui vivaient sa 24ème crise inflationniste en un siècle.
En réalité, l’explosion du télétravail n’aura pas comme prévu imposé l’idéologie d’abnégation souhaitée, mais la zone maffieuse la plus légale jamais existée sur la planète.
C’est les gars du commerce extérieur qui ont lancé le truc. Travailler à domicile, sans regard malveillant d’un supérieur, restait le meilleur moyen de sous-traiter son boulot de la semaine pour 3 X rien avec des correspondants pakistanais ou cubains. Les responsables des entreprises publiques et/ou concurrentse, qui n’avaient pas très bien capté la nature de l’arnaque, limitèrent les arrêts de travail aux strictes normes de sécurité. 1/4 d’heure toutes les 2 heures, tout en arrosant de primes les cadres faisant des heures supplémentaires pour essayer d’atteindre le rendement des gars du commerce extérieur... Bien entendu, à force, dans l’secteur public on s’y est mis aussi.
La sous-traitance a ses limites que pas mal de cadres ont dépassé. Du traitement de l’information sous-traitée, on passa progressivement au commerce de l’information, qui dérapa vers une fuite de cette même information
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16 : Lorsque Le parti de la Refondation corporatiste Européenne (RCE, centre) eu la majorité des 2/3 au parlement européen, Le pot aux roses fut, non pas découvert, mais dévoilé sans tabou, sous les huées du Pôle de Libération (PL, centre). Une mutation cinglante s’opéra. Les fonctionnèrent retournèrent dans des bureaux. La droite (centre droit) cria au scandale en affirmant que ce genre de dérive faisait basculer la société un siècle ou deux en arrière. Le patronat résistait à l’intimidation - sans pourtant digérer le fait que leurs propres cadres se sucraient largement sur son compte...
Les pouvoirs publics (RCE, centre ; PL, centre et le PSL, centre) étaient face à une contradiction quasi insoluble. Il était difficile de condamner la sous-traitance avec les pays fraîchement développés car cette nouvelle génération de nanti, et autochtones cette fois-ci, vivaient prospères dans ces pays et devenaient des interlocuteurs de poids qu’on ne pouvait négliger.
Que fait un gouvernement incapable de planifier un système marchand : il taxe.
20 : la transnational deal tax (TDT, centre). Le symbole même de la R.C.E. 400000 emplois-jeunes créés en U.E. Emplois de contrôle et de surveillance qui remplacera petit à petit les mouchards électroniques, trop facilement piratables. D’immenses logistiques de filtrage de l’informations marchandes fut mis en place au 4 coins de l’Union. En quelques années, cette pratique d’Etat est même devenue compétitive - et générant un "profit" réinjecté dans la recherche télématique - pour un accès aux réseaux pour tous disent-ils. La bonne affaire.
Mon boulot ? Ben, agent douanier au centre de triage fiscal de l’axe Nord Ouest du benelux...
Non loin de Segovia, perdu dans les montagnes de la Cordillère centrale, le campement intergalactique B12 était sur le qui-vive. Un arrivage important d’électrons parasitaires est à prévoir dans les prochains jours. Léo pestait dans la tente N°2. C’est lui qui est chargé de traduire la camelote en MIDI. Vingt-trois antiques Macintosh empilés les uns sur les autres emplissait la quasi totalité de la tente. Léo avait des problèmes avec son réseau intérieur qui, vieux d’un demi-siècle, laissait à désirer. Dehors, on entendait Tche et Kwet, morts bourrés, chantant le chant des partisans en hissant l’antenne parabolique sur la plus haute colline du maquis. L’antenne ; interface suprême entre l’electron et les machines. Des cris de joie se faisait entendre dans la brume matinale espagnole. Ca faisait un bail que les galactiK ne s’étaient plus neuroconnectés avec la Matière. Non loin de là , à la lisière du camps, on tirait des coups de mortier sur la caserne militaire de Segovia pour fêter l’événement. Dans la tente N°1, se pondaient des journaux d’informations concernant l’arrivée de l’électron parasitaire. Infos relayées sur les serveurs des Intersiderales, puis distribués dans les rues...
Escobar, entra dans la tente N°2 en se frottant les mains et le bout du nez. L’hiver était éprouvant dans la cordillère. Il enleva son bonnet en faisant gaffe de ne pas marcher sur le broll électronique jonchant le sol et tendit un joint à Léo qui laissa tomber un moment.
- "tout baye, Leo ?
Tout baye menti Léo, tout le monde avait confiance en lui, il ne pouvait déçevoir personne...