POURQUOI ETIONS-NOUS A GENES ?
Pour mettre en pratique massivement notre contestation d’un monde que nous refusons dans sa totalité (le monde de toutes les dominations, de toutes les oppressions, de toutes les exploitations).
QU’AVONS NOUS FAIT A GENES ?
Nous nous sommes attaquéEs à ce qui faisait partie intégrante de la bonne marche des dominations étatiques, capitalistes et patriarcales : banques, agences immobilières, concessionnaires automobiles, stations essence, agences de voyages, panneaux publicitaires (en particulier, mais pas seulement, ceux utilisant le corps des femmes comme des vecteurs de marchandisation), etc.
Nous avons ici et là empêché la police de prendre le dessus sur les manifestantEs, de façon à ce que les rues soient nôtres, soient celles de la subversion, le plus longtemps possible au cours de ces journées.
QUE VOULONS NOUS ?
Nous pensons que la mise en place d’une société dans laquelle chacunE aurait le pouvoir de diriger sa propre vie comme il/elle l’entend (ou en tout cas, une société qui le permette, une société sans hiérarchie, une société qui soit vecteur d’émancipation collective et individuelle) n’est pas envisageable sans la destruction complète des oppressions qui sont à la base des sociétés patriarcales et capitalistes occidentales. Si nous avons conscience que casser des vitrines, brûler des banques, même pour plus de cent millions de francs français de dégâts, ne révolutionnera pas le monde, nous pensons que c’est un moyen concret de déstabilisation des pouvoirs en place, et nous espérons également que cela puisse être la démonstration d’une colère qui doit se généraliser si nous voulons un jour ou l’autre vivre pleinement nos idées.
Nous ne cherchons pas à trouver une place au sein des discussions entre les maîtres du monde, nous voulons qu’il n’y ait plus de maîtres du monde. Nous ne reconnaissons aucune légitimité aux protagonistes du G8, comme nous n’en reconnaissons aucune à ceux de l’Union Européenne, de l’OMC, du FMI, de la Banque Mondiale, etc. Les chefs d’Etats ou de multinationales sont les plus hauts responsables de la dépossession de notre propre pouvoir sur nos vies. Ce n’est pas avec eux que l’on doit discuter de nos envies et de nos désirs puisqu’ils représentent des remparts à ceux-ci.
Nous ne voulons pas une amélioration du système politique, social et économique en place, nous voulons son remplacement par un ou des systèmes de vie collective autogérés, au sein desquels chacunE a son mot à dire, dans lesquels l’entraide est le but (et non la concurrence). A notre avis, les propositions de réformes du système capitaliste mondial ne sont que de na&iulm;ves illusions qui permettent à celui-ci de perdurer grâce à quelques semblants de "démocratie". Concrètement, les réformes proposées par quelques groupes politiques et/ou associatifs (taxe Tobin, revenu garanti, etc.) ne changent rien aux rapports sociaux actuels et ne font qu’accroître la soumission massive des populations aux pouvoirs politiques.
CE QUE NOS DETRACTEURS ONT TOUT INTERET A FAIRE CROIRE :
Que nous sommes des irresponsables haineux-haineuses venuEs sans aucun autre objectif que "tout casser". Que nous ne sommes que des jeunes hommes en manque d’émotions fortes, de décharges d’adrénaline, etc.
Nous pourrions nous contenter de répondre qu’il y avait une présence importante de femmes dans les black blocs, mais là n’est pas vraiment le propos : au sommet du G8, il n’y avait pas beaucoup de femmes et personne n’a semblé s’en plaindre. Le propos de telles critiques est de sous-entendre qu’en dehors de la destruction de biens matériels nous n’avons rien à proposer. Pourtant, en tant que groupe d’action au sein d’un black bloc, nous avons exprimé de nombreuses idées à l’aide de bombes de peintures sur les murs de la ville, et nous en avons lu énormément, écrites par d’autres : anarchie, autonomie ouvrière, lutte des classes, autogestion, refus du capitalisme, des banques, des frontières et des Etats, du patriarcat, du sexisme, de la marchandisation des femmes, de l’homophobie et de la lesbophobie, pour la libération animale, les squats, la libération de la Palestine, l’action directe, slogans "straight-edge" (refus de l’alcool, du tabac et de toutes autres drogues), etc.
Lors de ces journées émeutières, au sein de notre groupe d’affinité, nous avons voulu fonctionner sur un mode égalitaire. Les médias, comme les grandes organisations pacifistes, nous disent "casseurs aux méthodes masculines ou militaires". Curieusement, il y avait dans notre groupe affinitaire plus de femmes que d’hommes, et nous ne pourrions dire qui aurait pu faire office de Général... Même si beaucoup de décisions avaient à être prises rapidement, nous avons tenté d’écouter la voix de touTEs, en particulier de celles et ceux qui se sentaient le moins rassuréEs. Quant au discours pseudo-féministe tentant de nous convaincre que la "casse" est une affaire d’hommes, que veut-il dire exactement ? Que la manière non-violente d’utiliser son corps est bien plus cohérente pour des antisexistes ? Etre passive et victime, douce et modérée, sont pourtant des clichés féminins contre lesquels beaucoup de femmes se battent depuis très longtemps. En tant qu’oppriméEs, notre moyen de lutter n’est pas de nous noyer encore plus dans notre misère et d’adopter un discours misérabiliste qui attendrira éventuellement l’opinion publique pendant une semaine.
Si nous avions des raisons politiques bien précises de pratiquer la destruction de biens matériels, nous ne cacherons pas que briser directement les obstacles quotidiens à notre bien-être est un sentiment jouissif. Nous n’attendons pas le Grand soir ; nous voulons dépasser les plaisirs normés et les peurs que ce vieux monde nous impose, et c’est bien parce que nous vivons dans un monde monotone et effrayant, composé de devoirs, de "droits", de supermarchés et de flics, que le détruire se doit d’être jouissif. La destruction de biens matériels est la démonstration en actes qu’il y a des problèmes politiques et sociaux. De toute façon, la "casse" est pour nous une tactique réfléchie et adaptée à la situation, elle va bien au-delà du "défouloir pour violents". Les objets, vitrines, enseignes cassés ne sont pas pris au hasard. Ils sont ciblés en fonction de l’impact qu’ils ont sur notre vie quotidienne. Nous les détruisons parce qu’ils sont parmi les atouts de nos sociétés "spectaculaires marchandes", parce qu’ils représentent notre propre destruction.
Que nous avons été manipuléEs, par des forces politiques "au-dessus" de nous, notamment par la police. Que nous avons été infiltréEs par la police.
Ce que nous avons fait à Gênes, nous avions prévu de le faire. Et manifestement, comme prévu, la police ne nous a pas aidé. Dès qu’elle en avait la possibilité, la police s’attaquait violemment aux black blocs. C’est grâce à des réactions tactiques, stratégiques, que nous avons pu éviter de nous faire massacrer (solidarité de groupe, jets d’objets sur la police, barricades, mobilité et mouvements de foule, etc.). Nous ne nions pas la possibilité que des policiers "déguisés" se soient infiltrés dans certains black blocs. Il semblerait logique qu’il y ait eu des policiers infiltrés dans tous les cortèges. Certains, par exemple, se faisaient passer pour des journalistes ou des ambulanciers. C’est un moyen de contrôle bien connu pour identifier et étudier les manifestantEs et leurs agissements. Par rapport à cela, notre but est bien évidemment de les repérer et de les faire dégager.
A Gênes, nous avions prévu de nous attaquer à des bâtiments représentant diverses formes de pouvoir. Nous nous sommes exécutéEs avant que de quelconques provocations policières puissent avoir lieu. Nous l’assumons entièrement et tenons à faire remarquer que si la police a bien évidemment participé directement aux violences de ces deux jours, c’est en s’attaquant aux manifestantEs, de toutes parts. La violence policière s’est exprimée massivement sur quelques km" à Gênes, de la même manière qu’elle le fait quotidiennement partout ailleurs. Pas besoin de manifester contre le sommet du G8 pour ça.
Que les blacks blocs, "une minorité de manifestantEs", ont gâché la fête.
Le but des manifestantEs était, pour la quasi-totalité, de rentrer dans la zone rouge, de perturber le sommet du G8. Nous avons à notre façon perturbé le sommet du G8. A Gênes, les maîtres du monde voulaient être tranquilles. Vingt mille policiers devaient leur assurer la paix sociale. Cela n’a pas fonctionné du tout puisque ces milliers de sbires n’ont pu s’empêcher de tuer une personne, d’en blesser plus de six cents, d’en arrêter et d’en torturer des centaines... Diaboliser les black blocs est très utile pour certains partis et organisations politiques, qui par contre coup sont les seuls détenteurs d’une légitimité à manifester. Mais la division manichéenne des manifestantEs en "gentilLEs pacifistes" et en "méchantEs casseurs et casseuses" ne peut que faire le jeu du pouvoir, qui n’a pourtant pas fait de détail quand il s’est agi de réprimer le plus brutalement possible. Cette division est d’autant plus incohérente lorsqu’elle provient de personnes dites de gauche, qui soutiennent certaines luttes armées comme celle au Chiapas. Est-ce que c’est parce que nous, occidentaux et occidentales, nous souffrons moins du capitalisme que d’autres et que certaines femmes sont moins ouvertement opprimées, que notre tentative d’ébrécher le système est moins légitime ?
D’autre part, nous tenons à rappeler que plusieurs milliers de manifestantEs ont pris part à la destruction de biens matériels et aux affrontements avec la police, que ce soit de façon préméditée ou spontanée. Il ne s’agit pas d’une "minorité" de personnes, pas plus en tout cas que les autres cortèges n’étaient des "minorités", chaque groupe ayant sa manière d’agir.
Enfin, Bush a reproché aux manifestantEs de prétendre représenter les pauvres. Pour ce qui nous concerne, qu’il se rassure, nous ne représentons que nous-mêmes. Mais c’est déjà énorme, et plus nous serons nombreux et nombreuses à parler et à agir contre ce vieux monde, plus Bush aura de raisons de trembler au fond de sa Maison blanche... La révolte contre ce monde n’est pas minoritaire, encore moins anecdotique, elle s’exprime partout à travers le monde, dans les écoles, les cités, les rues, etc.